mercredi 15 décembre 2010

Oh! Pardon!

_ Pardon! Je ne pensais pas, je ne voulais pas, je ne croyais pas! Que les poignards dans le dos ça te ferait si mal! Qu'une balle dans le cœur ça te ferait souffrir! Oh! Pardon! Je ne pensais pas que mettre le feu à ta peau pouvais te bruler. Pardon! Je ne savais pas. Je ne sais pas ce qui s'est passé. J'ai trop bu, j'ai trop fumé. C'est la drogue. Ce n'est pas moi. Je n'avais pas vu que tu étais là. Je ne t'avais pas vu, ce n'est pas exprès que je t'ai marché dessus. Je ne pensais pas que c'était toi. J'ai mal regardé. Mal vu. Je n'ai pas pensé. Pardon! Pardon! Allez! N'en parlons plus. Ce n'est pas important. N'y pensons plus. Je n'y pense plus, déjà. Allez! Ramasse tes tripes, là, par terre. C'est un peu indécent. Et nettoie tout ce sang, s'il te plait, ça fait un peu sale, enfin! Tu es dégueulasse. Tu l'as bien mérité. Vu comment tu es, à ressentir des choses. Tu sais, c'est ridicule, quand même! Allez! Relève-toi, sèche tes larmes. Prends ton cœur, là, sous mes pieds!

_ Ok! Ok! Un, zéro! Tu gagnes, j'avoue! Je me suis fait avoir! C'est une belle escroquerie. Bien joué. Tu as gagné! Là, tu as gagné. Ça manquait de classe, c'est certain, mais ça compte quand même. C'est de ma faute.Me laisser piéger comme ça. J'ai oublié toutes les règles de base. Ne jamais tourner le dos. Ne jamais faire confiance. Ne jamais mettre son cœur sur une table qu'on n'a pas fabriqué soi-même. Ne jamais se montrer gentil avec ceux qui prétendant t'aimer. Ne jamais rêver en compagnie de personnes qui pensent te connaitre. Je sais ce qu'on peut me rétorquer. Je ne suis pas assez comme ci. Je suis trop comme ça. au final, je suis trop délicat pour votre monde grossier. Trop noble pour vos basses manœuvres, vos gestes mesquins. Tout le sang a coulé, maintenant. Une belle saignée, pour purifier le corps, alléger les sens. Tous les sentiments se sont écoulés, ne reste que du métal fondu dans une froide colère. Merci d'avoir réveillé cette monstrueuse machine. Encore. Merci. Maintenant, peu importe! Une seule logique: celle du pire. Tiens-toi loin! Loin de moi!

_ Silence! Taisez-vous! C'est fatiguant à la fin. Qu'est-ce qu'il ne faut pas entendre? Ça se touche, ça se blesse puis ça pleure, ça s'auto-flagelle et ça se fabrique des discours ennuyeux sur la vie, sur les hommes, sur l'amour et sur le monde! Quelle tristesse! Et en plus ça dérange mon sommeil. Je crois que je vais finir par vous expulser tous d'ici et me trouver des compagnons plus drôles. Plus d'histoires de cœur, de sang, de colère et de métal. Plus jamais ces bêtises. Marre de cette lourdeur, cette sentimentalité poisseuse et tous ces affects vaseux. Que ça danse, d'accord, que ça vibre, que ça résonne, lumière ou obscurité, jour ou nuit, mais pas ça! Surtout quand ça gâche ma sieste pour du gris fade et des faux semblants. Un peu de sauvagerie, merde! Finis la sainteté, les gestes corrects et limités. Un peu d'ampleur et un peu plus de légèreté, de la fureur, de l'ivresse et du cran. Et du silence. S'il faut vous entretuer, faites le au moins avec panache. De la cruauté, oui! Mais de la méchanceté et des reproches, non! De la musique, de la vraie ou bien du silence. Ce n'est pas la télé, ici. Vos gueules!

_ C'est bon là? Ils sont partis? Il faut démonter tous ces miroirs. Changer les meubles, repeindre les murs. La porte reste ouverte mais j'exige le calme. Qu'on me foute la paix! Je suis chez moi, non? Je veux pouvoir contempler le ciel sans interruptions. Je veux survoler l'abîme sans inquiétudes. Faites-vous oublier. Merci. Je veux rire sans avoir à me retenir. Mes larmes ne vous concernent pas. Je n'ai pas envie de vous entendre. Ni de vous parler. Finissons-en. Là c'est l'heure. Du mur entre la bibliothèque et le canapé sort une horde de spectres dansants et hilares, à leur suite mon ami Sam avec son éternel tambourin. C'est une sorte de voyageur qui ne respecte aucune frontière, ni temps, ni espace, ni vie, ni mort, ni murs ni rien. Il vient, s'en va, toujours cruel, toujours de bonne humeur. Ludivine, ma campagne extraterrestre, se matérialise doucement sur le canapé, lascive, menteuse, obsédée et moqueuse. Je l'adore! Des musiciens zoomorphes entrent par la fenêtre et s'égaillent dans le salon dans un capharnaüm de fausses notes et un reste de discussion incompréhensible commencée depuis longtemps. Que la fête commence! Ce n'est pas avec les humains qu'on peut s'amuser!

 

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