vendredi 27 septembre 2013

L’ombre douce qui balaie les crêtes 3ème Partie





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Je sens venir l’obscurité. La nuit tombe soudain comme un voile. Je prends alors conscience de ma propre peur, une peur animale, incompréhensible. Elle me découpe en deux, puis en quatre, en huit. Elle me divise à l’infini sans que je sache d’où elle peut bien naitre, ni ce qu’elle montre. Je reste là, face à ces deux êtres surnaturels, magnifiques et terribles. Dans leurs yeux une lumière inexplicable que l’obscurité a révélé. Je suis pris dans leurs regards, aveuglé, incapable d’avoir la moindre pensée cohérente. J’entends des chuchotements. Des voix viennent de partout. Mais je ne discerne aucun mot. La femme opine doucement du chef. Des lianes sortent du sol et doucement commencent à me toucher, à parcourir tout mon corps, explorant toute ma peau, roulant sous mes vêtements. Les lianes me serrent, me tiennent et m’enferment. Je suis soulevé dans un filet végétal. Les lianes me portent dans le ciel de la clairière. Je suis terrifié mais leur emprise est dénuée de violence. Elles sont sûres, impérieuses et bienveillantes. Les bras écartés, le corps droit et immobilisé. Flottant entre ciel et terre, je regarde les étoiles. Je crois que je n’ai jamais vu autant d’astres dans le ciel, avec autant d’acuité. Libéré de ma propre pesanteur, j’entends enfin ce que disent les étoiles. Et je me dissous dans l’infini. Des particules de ce que je supposais être ma personne se révèlent dans le vide, comme des explosions sourdes et insignifiantes de sentiments que je reconnais. Peur, perplexité, abandon, colère, douleur. Et ça ne dure qu’un instant. Je retourne dans l’inconnu. J’essaie de raisonner, d’expliquer. Ma raison s’effondre ne laissant en moi que souffrance et égarement. Je hurle : « Silence ! ». Silence. Tout mon être n’aspire qu’au silence.
Soudain, une voix calme, qui vient de moi et hors de moi, prononce clairement : « Silence ! » Et tout s’éteint. Je ne suis nulle part. Je ne ressens rien. Je ne pense rien. Inconscient, je suis, simplement. Suspendu. Libéré. Je ne sais pas combien de temps cela dure. Le temps est aboli. J’entends un appel. Est-ce que quelqu’un a prononcé mon prénom ? Je ne sais pas si j’ai un prénom.
            L’instant me trouve marchant dans un épais brouillard. Je marche sans but. Je flotte peut-être. Je me déplace, je crois. Je ne distingue rien. Je traverse le brouillard. Je ressens ou peut-être j’imagine son épaisseur, sa densité. Au bout d’un moment, le brouillard se lève, s’éclaire. Je vois une lumière et la suis. Je vois un pont et le traverse.

(A suivre…)

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