mardi 26 octobre 2010

Daimôn 2 - Anamnesis

Heil César!
Nous qui allons mourir 
te crachons toute ta misère au visage
nous ne souillerons pas l'arène
de ton image
et nous ne salirons pas nos gestes
du silence de ta chute.
César!
Nous qui allons mourir
te rions au nez
et notre rire résonnera
au-delà de ta misérable mémoire.

dans un moment d'auto-survol
je me vois fou
courant dans tous les sens
rouage parmi les rouages
sans conscience
nerveux reptilien
essayant d'attraper le vent
maîtriser les miroirs
essayant d'embraser les mirages
et d'habiter les tiroirs.

dans un moment de lucidité
j'ai vu les larmes
sur des visages qui m'entourent
j'ai conféré alors avec
ma folie
pour ouvrir un chemin
sans retour

Ne jamais se dissocier du mal.
Ne jamais se complaire dans une vérité.

J'invoque la violence!

Quand j'entends le mot violence
Ha! Ha!
Je sors mon humanité
ma langue, ma morale, mon dieu caché.
Quand j'entends le mot violence
je me dis que j'aurais dû lustrer ma conscience.

Parfois un geste de trop
une parole sans importance
le mot qu'on laisse tomber
parfois la caresse égoïste
un dernier baiser
la douceur mal-placée
la gentillesse qui n'est qu'un masque
la générosité coupable
le sourire forcé

Qu'est-ce que la violence?

Et j'invoque, ici, une violence
Intempestive. Libérée.
Neutre et sans arrières-pensées.
Sans commanditaire. 
Toujours juste. Toujours injustifiée.
Celle de l'univers, des puissances indomptées.
De la vie qui se bat, qui tue, qui est tuée.
Pour toujours renaître. Se perpétuer.
Au-delà de ses propres formes.
au-delà de ses objets.

Je m'excuse. Par excès de politesse. Pour ménager ta vanité. Ou simplement par moquerie. Je m'excuse. Je vais assassiner tes illusions. Ne t'en fais pas. Tu t'en inventeras d'autres. Il faut bien que le mensonge se perpétue. Il faut que le spectacle continue. Je ne te plains pas. Je ne te maudis pas. Ton sang m'intéresse mais tes dilemmes m'indiffèrent. Tu vas mourir. Oui. Tu vas mourir. Et tes rêves seront dénombrés. Un rêve de dissolution. Trois rêves de puissance. Huit rêves d'enfermement. Deux rêves d'adoration. Cinq rêves de domination. Et peut-être, peut-être un rêve de liberté.
J'arrête. D'accord. J'arrête. J'aime trop. J'avale des flammes, je bois du feu. Et après, après, je me prends au jeu. Pardonne-moi! Qu'est-ce que tu disais déjà? Qu'est-ce que tu fais dans... la vie... oui, oui...dans la vie... Oh! ça a l'air passionnant. Comme tu en parles ça a l'air passionnant, ça donne envie. Ah! Moi? Tu veux savoir? Moi?

Monstre chasseur de monstres
j'habite Aujourd'hui-Le-Crépuscule
avec vue sur les ruines d'un cœur
qui fut sacré
mais rien n'est plus...

Monstre chasseur de monstres
drôle de métier
rares y sont les retraités
aucune sécurité

Les yeux ouverts
Les yeux fermés
au final on est juste qui on est.

Malgré toi! Malgré moi!
Monstre
Chasseur de monstres
Je l'ai déjà dit
la Vie dévore la Vie.

Mais regarde qui va là
regarde-moi ça
je savais que tu allais venir
toi l'habitué
content de te voir Thésée
je savais
tu n'as jamais raté
un carnage
tu n'as jamais manqué
une battue
Pour cet ultime banquet
tu es le bienvenu
Ici nous serons tranquille
il n'y a plus d'oracle
et l'électronique
a dompté la prophétie
nous serons tranquilles
libérés
tu pourras donner libre cours
à ta brutalité.

Ce silence griffu, lové dans le giron de la prêtresse nue, étendue contre le corps immobile de la prophétie.
Libérés.

Anciennement rue des Innocents.
Nous avions rêvé, je crois. Nous avions rêvé. Au final, je préfère. Maintenant, plus de faux-semblants. On va finir par l'aimer, cette humanité. A coup d'épée. Elle va finir par nous aimer. N'est-ce pas, monstre?
Allez! Bois Thésée! Bois! On va finir par se fondre un peu dans la masse. On va finir par s'intégrer. Regarde! Comme ils se ressemblent tous! Bois! On va finir par croire que tu n'as pas de manières! Toi! Roi fils de roi. On va finir par te repérer. Monstre tueur de monstres. Goûte, Thésée, cette eau de feu. Goûte ce produit de la technologie. Et bois encore! Bois! Parce que quand l'Arabe viendra, il faut être à la hauteur, il faut être à niveau. Soit certain que lui a commencé beaucoup plus tôt et il va venir dangereux, alcoolisé, toujours sûr de son épée courbée. Et va nous fatiguer avec son amour et ses poèmes d'amours et ses rimes embrouillées. Il est né dans le désert, lui, et la soif le connait. Alors bois, Thésée, ne fais pas honte à l'Europe, à ta Grèce natale. Bois, Thésée! Qu'es-ce qui se passe? Ton monde ancien et sale te manque? Réveille-toi! La musique est bonne, les femmes sont belles et tout est en train de changer. Les monstres courent les rues, rassure toi! Tu auras ton carnage! Vampire! Tu goûteras ce nouveau sang! Eh! Eh! Bois! Bois vite! Tu sens cette électricité? Tu sens la tension? Il arrive! Antar arrive! Cette odeur de silice. Se sable brûlé! Il n'est quand même pas venu à cheval? Tu peux croire ça? Il ne pouvait pas prendre le métro comme tout le monde?

Salut les Anciens!
Qui bois quoi?
allez! c'est ma tournée
c'est toi qui paie Thésée
tu me dois de l'argent
tu te souviens!
tu as perdu ton pari
j'ai sillonné la ville depuis ce midi
aucun dieu à l'horizon
aucun Zeus aucun Apollon
pour relever le défi
aucun n'est venu demander sa part
de ma bouteille
aucun n'est venu me disputer une femme
ou chipoter sur mon usage
des flammes.
Ce n'est pas grave! Thésée!
Il ne faut pas te fâcher!
qu'est-ce qu'ils t'ont donné les dieux? 
Ils n'ont fait que te trimbaler par-ci par-là
à t'embarquer dans des histoires abracadabrantes
le Minotaure, les Argonautes,
exilé de plus en plus loin
l'un sabote tes affaires
l'autre te pique ta femme
ah! j'oubliais, ça c'était une excuse, une ruse de ta part
N'empêche
Thésée ici. Thésée là-bas.
Thésée couché, assis, va chercher.
Comme s'il ne pouvait rien se passer sans toi! 
Jamais de vacances. Même pas un week-end!
Dis-toi que cette fois, c'est pour le plaisir!
On va s'amuser et tout ravager dans la joie.
allez! goûtez-moi ça! c'est génial!
c'est le genre d'invention qui me redonne de l'espoir
dans le genre Qu'Humain.
C'est une boisson de druides, il paraît!
J'ai découvert ça! Goûte!
Cela s'appelle le Oui-C'est-Qui.
Du tonnerre de Zeus! Que se salaud repose en paix
et ne revienne jamais! Amen! Santé!

Oui. C'est qui? Qui? J'essaie de me souvenir, mais ça ne revient pas. C'est dans ces moments là qu'on réalise la profondeur du temps, cet espace.
...
[A suivre]


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